Récit de quelques jours passés entre collègues suisses dans ce coin de paradis turc… Entre découverte, apprentissage et régalade. Bon voyage à Dedegöl!
Novembre 2022: je relaie ici message important des grimpeurs et équipeurs turcs! Merci à toutes les personnes visitant ce magnifique site de suivre ces règles!
⚠️ Recommandations aux grimpeurs et équipeurs à Dedegöl ⚠️
Vous vous trouvez dans un parc national et, afin de garantir un maximum de sécurité et d’assurer la pérennité des voies, voici les règles de l’équipement à Dedegöl:
1/ Ouverture exclusivement depuis le bas, sans « petite triche » (escalade artificielle, trous forés ou « Pulse » entre les points, détours…). Si vous n’arrivez pas à passer en escalade libre, préservez ce projet pour les générations futures !
2/ Equipement exclusif en scellements (depuis le bas), ou à minima en goujons de 12mm => La raison étant que les écrous des goujons de 10mm se dévissent trop facilement et que les plaquettes « tombent », ce qui obligerait les grimpeurs locaux à assumer le travail d’entretien. Acier inoxydable bien sûr (A316L).
3/ Pas de liaisons en cordelette pour les relais. Les relais doivent être chaînés, ou avec deux points séparés de type « boucle + double boucle ». En terminaison, dans tous les cas : maillons ou boucle perpendiculaire au rocher.
4/ Nettoyage des voies intensif et professionnel : mettez-y toute votre énergie, avec des outils appropriés (=> « piton long » de 40cm minimum).
Merci 😉👍🏻
Arrivés au camp de base, tout le monde déchiffre ces fabuleuses faces de 500m de haut sur lesquelles nous irons grimper ces jours. À droite, Alex. À gauche, Taffon, le nouveau venu chez Helyum!
Afin de maintenir à jour notre autorisation d’exercer de guides de montagne, nous devons régulièrement suivre des cours de formation continue. Ces derniers sont organisés et dispensés par des collègues dans un domaine qu’ils maîtrisent particulièrement. C’est aussi une jolie occasion de passer du temps ensemble, à échanger sur notre métier que nous exerçons principalement seuls. Cette année, Adrien Godat et Michel Piola ont proposé un séjour en Turquie dans la fabuleux massif des Dedegöl. La thématique de la formation était l’ouverture et l’équipement sur scellement. Michel Piola n’a plus de nom à se faire dans le monde de l’escalade. Prolifique depuis des décennies, c’est la référence en matière de travail bien fait: ses voies sont toujours belles et équipées intelligemment.
Découvert il y a une quinzaine d’années par Öztürk Kayikci, la figure du monde grimpant turc, le massif a tout d’abord vu, en 2002, des ouvreurs anglais parcourir ses flancs. Puis, dès 2003, des cordées franco-turco-suisses ont continué d’ouvrir de nouvelles voies. Michel Piola en a fait son fief et il y a ouvert des voies exceptionnelles.
Jusqu’ici la discrétion était de mise au sujet de ces montagnes: l’idée était à la fois de laisser le temps aux locaux d’adapter leur offre d’accueil aux grimpeurs et également de minimiser la probabilité de fermeture du site par les autorités, potentiellement effrayées par une arrivée massive de grimpeurs de tous bords. Mais un récent projet de mines de marbre au pied de face a changé totalement le paradigme. Désormais, il s’agit de faire connaître ce lieu et surtout de montrer aux autorités et à la presse locale qu’il recèle d’un réel potentiel touristique afin de bloquer ce project dévastateur. Notre venue aux Dedegöl n’est donc pas fortuite: onze guides qui viennent une semaine équiper et grimper ici est un signe clair que le site a de l’intérêt.
Alex, dans la deuxième longueur du « Grand vent de l’Anatolie » (6c)
Avec Alex, nous avions envie de parcourir ensemble quelques voies qui nous avaient tapé dans l’oeil sur les croquis de Michel. Nous avons eu la chance et l’honneur de faire certainement la première répétition de « Le grand vent de l’Anatolie » ( 550m, 7a max.), ouverte par nos deux organisateurs (Adrien et Michel) il y a deux ans. Malgré un rocher d’une exceptionnelle pureté, il leur a fallu pas moins de douze jours pour achever ce fabuleux projet! Entre l’ouverture du bas, l’équipement sur scellement et un nettoyage « au peigne fin » dont Michel est l’ambassadeur, ouvrir une telle voie est un travail titanesque. Merci messieurs, le plaisir que nous avons eu à y grimper est peut-être à la hauteur de la sueur que vous y avez déversé!
Troisième longueur en 7a du « Grand vent… »
L’exceptionnelle douzième longueur en 7a…
Michel avait repéré pour nous tout un secteur, au pied des longues voies, qui pouvait accueillir quantité de moulinettes (voies d’une longueur) de qualité. C’est l’occasion de mettre en pratique nos toutes jeunes connaissances en matière d’équipement sur scellement. Contrairement aux « spits », qui sont des chevilles dont le vissage de l’écrou écarte les pannes au fond d’un trou percé, le scellement est une broche qu’on colle dans un trou percé. Ce type d’équipement à plusieurs avantages: très solide, aucun dévissage d’écrou possible, discret et durable. Michel n’équipe désormais plus que comme ça et son efficacité est troublante.
Le résultat est enthousiasmant: il y a désormais dix nouvelles moulinettes de 40m. Ouvrir ses premières longues moulinettes aux Dedegöl, c’est comme faire sa première plongée sous-marine aux Maldives. C’est presque un scandale!
Du sérieux messieurs! Tout le monde écoute attentivement les conseils du « maître » en matière de scellement.
Mise en pratique: percer, placer le « removable blot », grimper puis percer à nouveau, préparer la colle, coller et laisser sécher. Tout un processus de longue haleine pour arriver à un résultat beau et solide.
Quand Michel colle un broche, cela prend 3 minutes. Nous… un peu plus!
Après le « Grand vent… », Alex et moi nous sommes lancés dans une longue voie récente qui remonte une face dont la raideur du profil nous fait bien rêver: Butterfly Project. Un orage d’une rare violence nous a surpris au milieu de la voie et nous obligera à la faire en deux fois: une vire permet d’accèder à pied à la deuxième partie, parcourue par conséquent trois jours plus tard. De quoi rentrer bien heureux de nos grimpettes turques…
Dans « Butterfly project »: certainement la plus belle longue voie dure des Dedegol (500m, 7b, 7a oblig.).
Sur le pilier final de « Butterfly project ».
Encore un immense merci à Tafa, Michel et Adrien pour l’organisation sans faille de cette super semaine! « Standing ovation » également pour toute l’équipe de Montis Expeditions: le camp de base était grâce à vous un havre de confort, de gastronomie et de bonne humeur. Et merci à tous les autres participants, Monica, Daniel, Olivier, Taffon, Alex, Jean-Bernard (appellez-le Jib’s si vous le croisez!), Christian, Lucas et Matthieu pour l’agréable ambiance instaurée tous ces jours durant. Bravo l’ARGM de permettre ce genre de formation à vos membres. On prend les mêmes et on recommence l’année prochaine?